vendredi 19 février 2010

Le jeûne, une pratique de santé?


Tandis que nous entrons dans la période qui précède l'équinoxe de printemps -période d'intense renouveau!-, et, traditionnellement, dans ce que l'on appelle "le Carême", le moment semble choisi pour aborder une pratique qui existe dans toutes les civilisations, qui est recommandée de préférence aux inter-saisons, et qui s'avérerait souverain là où bien des remèdes échouent...


Qu'est-ce que le jeûne?

C'est tout simplement la privation courte, ou prolongée de nourriture. Sachez-le, nous jeûnons quotidiennement, entre deux repas, et notamment la nuit. C'est la raison pour laquelle, le matin, nous sommes à jeûn, et que nous "petit-dé-jeûnons" (en anglais, breakfast veut dire littéralement "casser le jeûne"), c'est-à-dire que nous rompons la privation de nourriture en apportant au corps une quantité (modérée) d'aliments. Ainsi, le fait de jeûner est souvent synonyme de mettre l'organisme au repos. C'est le cas lorsque nous sommes malades, où, dans certains cas, notamment d'indigestion, ou de maladies fébriles, nous ressentons le besoin inhabituel de "ne pas manger". Or, ce réflexe organique présent dans certaines affections nous donne à réfléchir quant aux vertus du jeûne dans le rétablissement de notre équilibre...


Ascétisme et renouveau

Les philosophies orientales prônent l'usage régulier du jeûne, considéré comme l'une des voies royales pour parvenir à clarté mentale. Bon nombre d'entre nous s'interrogent, car nous sommes constamment obsédés par la nourriture, et plus encore par l'idée d'en manquer. Or, c'est bien le manque qui crée ici la possibilité d'une plénitude: car le manque recrée un espace, dont l'esprit a besoin pour trouver son équilibre et pour croître.
En Inde, plus qu'ailleurs, l'absorption ou la privation d'une certaine catégorie de nourriture (la viande, par exemple), est fonction des coutumes religieuses. Il existe dans le calendrier hindou un très grand nombre de jours de jeûnes, dont le jeudi de chaque semaine: la plupart sont liés à des fêtes religieuses. Il consiste soit dans une privation totale de nourriture, soit dans une absorption exclusive de certains aliments (fruits, par exemple), ou une restriction d'autres.
Le jeûne a dans ce cas souvent une fonction de purification, et de protection face aux adversités de la vie, comme de la maladie. S'agit-il simplement d'une affaire de croyance?
Notre tradition judéo-chrétienne nous apporte ici quelques lumières. Dans le Judaïsme, la plupart des jours de jeûne sont associés à des deuils, et donc à l'idée de se dépouiller de ce qui est "ancien". Dans le christianisme, il est associé à la période de quarante jours où Jésus resta au désert, et qui coïncidèrent avec le début de sa vie "publique". Soit à un moment de préparation, d'acquisition des forces nécessaires au passage vers la maturité, ainsi que d'une capacité de résistance face "aux tentations".
Nous envisageons alors un aspect essentiel du jeûne: celui de l'équilibre subtil entre le corps et l'esprit. A savoir que notre résistance physique ne se repose pas uniquement sur les apports extérieurs... Mais alors, comment le jeûne contribue-t-il à notre santé?


Le jeûne en questions

1. Comment le jeûne peut-il contribuer à notre équilibre?

Prenons un exemple précis: lorsque nous avons une fièvre élevée, bien souvent, nous perdons l'appétit, et nous jeûnons, partiellement ou totalement, pendant 24 à 48h. Or la nourriture, par les calories, comme la digestion, par son action sur la circulation, augmente la chaleur de l'organisme. En ne mangeant pas, ou des aliments très légers, et diurétiques, la fièvre tombe parfois d'elle-même... Il en est de même pour de nombreuses conditions d'excès de l'organisme.

2. Le jeûne est-il fait pour tout le monde?

Non. Privez un nourrisson de nourriture pendant plus d'une journée, et il se retrouve en très grand danger de succomber. De même, dans certaines affections, comme le diabète, de maladies débilitantes (où l'organisme est très affaibli) et chroniques. D'autre part, le jeûne mobilisant nos réserves, les individus de complexion mince, ou présentant des déficiences tissulaires, pourront se sentir beaucoup plus affaiblies que des personnes bien portantes, et voir notamment leur immunité chuter, leur nervosité augmenter, et certaines fonctions hormonales ou endocriniennes affectées. Enfin, le jeûne a une incidence notoire sur le rythme cardiaque.

3. Que penser du développement des cures de jeûne?

Depuis quelques années, l'on assiste au développement de cures de jeûnes organisées pour des groupes de personnes de conditions, d'âge, et d'horizons diverses. Une remarque de bon sens: nous sommes chacun unique, et contrairement à ce qui est répandu, il n'y a pas d'alimentation standard. Notre âge, notre morphologie, le fait que nous soyons homme ou femme, notre activité physique, intellectuelle, le climat sous lequel nous vivons, sont autant de facteurs qui modifient notre rapport à l'alimentation. Il n'y a pas, par conséquent, pas de jeûne standard, mais plus sûrement une écoute attentive de nos besoins, dans les apports, comme dans la restriction.


Une alternative: diète et monodiète

En dehors des motivations religieuses, ou encore politiques ("grève de la faim"), qui veut améliorer sa santé, retrouver un esprit sain dans un corps sain, comme le disait un humaniste célèbre, doit juste mesure garder en toute chose. Ainsi, la modération, ou "continence" est souvent préférable à la privation.
En Inde, les jours de jeûne sont en réalité bien souvent des jours de monodiète, où l'on consomme exclusivement des fruits. Sur ce sujet, Gandhi a écrit sur sa propre pratique du jeûne des chapitres entiers, et nous permet, à travers cet exemple contemporain, d'en comprendre les bienfaits, comme les écueils.

Si nous sommes un tant soit peu à l'écoute de notre organisme, nous prenons conscience que notre appétit, ou notre envie de consommer tel ou tel type d'aliments varie suivant les moments de la journée, ou de l'année. C'est tout particulièrement vrai aux saisons de transition que sont l'automne, et plus encore, le printemps. La période du Carême, dans nos calendriers, nous indique le moment privilégié où il nous faut cesser d'accumuler des réserves pour combattre le froid, et de commencer à modifier nos habitudes alimentaires, à changer autant que nous le pouvons ce qui est "lourd", "gras", en "léger", et "sec".
Une restriction partielle de certains aliments, peut s'avérer bénéfique, notamment si nous en ressentons spontanément le besoin. On parlera alors de "diète", plutôt que de jeûne. Qui est une alternative adaptable à chacun selon sa condition, et ses besoins spécifiques. Car nous ne sommes pas égaux devant notre capacité à restreindre notre alimentation, ou à nous en priver: pour certains d'entre nous, cela peut s'avérer dangereux, ou encore causer des dommages irréversibles. De façon générale, l'un des soucis majeurs pour l'équilibre concerne l'équilibre acido basique: la libération d'acidité (lié à l'acide chloridrique, ou bile, qui remplit la vésicule entre deux repas, et est liée à la sensation de faim) étant dans tous les cas dommageable à l'équilibre des fonctions de l'organisme, comme à celui des tissus.

Quoiqu'il en soit, et quelle que soit notre disposition personnelle avec l'arrivée du printemps, veillons simplement à sentir intuitivement quelle serait la meilleure façon pour nous de préparer au renouveau de la nature. Et changer nos habitudes un tant soit peu, c'est aussi cela "jeûner"!

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